Un Anglais dans mon arbre

d’Olivia Burton et Mahi Grand

Livre 159 (BD/roman graphique): Un Anglais dans mon arbre d’Olivia Burton et Mahi Grand aux éditions Denoël (224 pages) (2019) 🇫🇷 Lecture de janvier 2021

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Résumé de 4e de couverture :

« Trouver un Anglais dans son arbre généalogique, ce n’est pas follement original. Sauf s’il s’appelle Sir Richard Francis Burton, aventurier, explorateur impétueux du Continent noir, traducteur du Kamasutra, découvreur des sources du Nil. L’intrépide Olivia se lance sur la piste de cet aïeul extravagant. À nous deux, l’Afrique! Découvertes, déconvenues, émerveillements, tribulations jusqu’au vrai lieu de naissance du grand fleuve appelé «Père des eaux». Preuve que «ce qui compte ce n’est pas le but, c’est le chemin». »

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Mon avis :

En cherchant de nouveaux livres pour remplir ma PAL à la médiathèque, je suis tombée sur ce titre accrocheur qui a résonné en moi. Un Anglais dans mon arbre ? Oui, moi aussi j’ai des ancêtres anglais qui viennent peupler les branches, rameaux et autres ramifications de mon arbre généalogique. Ma curiosité attisée, j’ai ramené ledit livre chez moi et me suis plongée dans sa lecture.

J’ai adoré suivre Olivia Burton dans sa quête d’identité, dans ses recherches généalogiques pour découvrir qui était ce mystérieux ancêtre associé à une branche de sa famille. Nous voilà donc partis sur les traces de Richard Francis Burton, un explorateur du XIXe siècle qui nous entraîne en pleine période coloniale anglaise en Afrique. En tissant une toile entre le passé et le présent, Olivia Burton nous permet d’appréhender les difficultés à démêler le vrai du faux dans la généalogie, les recherches poussées qu’il faut mener pour parfois aboutir à une impasse. Mais elle nous parle aussi de cette joie fébrile qui se réveille en nous quand nous apprenons à connaître nos ancêtres. Parfois, ce ne sont que de petits détails : des photos, des écrits, des objets leur ayant appartenu. Mais à d’autres moments, cette joie de découverte passe par des paysages, des lieux hantés encore par le souvenir de cet ancêtre. Dans le cas de Richard Francis Burton, il s’agit des sources du Nil qu’il n’a finalement pas découvertes. L’occasion pour Olivia Burton de marcher dans ses traces et de réaliser le rêve de cet hypothétique ancêtre.

Un Anglais dans mon arbre est un roman graphique intime qui parlera à tous ceux qui ont un jour essayé d’esquisser leur généalogie. Il évoque avec pudeur le frisson des recherches, de la découverte, mais aussi des déceptions. Pourtant, il raconte un très beau voyage à travers le temps par le biais de cet explorateur anglais : Richard Francis Burton. J’ai vraiment apprécié tourné les pages et mener cette enquête généalogique avec l’autrice. Une histoire touchante qui m’a donné encore plus envie de me remettre dans mes propres recherches généalogiques, ce que j’ai d’ailleurs fait depuis.

Ma note : 17/20

Les + :

Le dessin et sa mise en scène : Un des points forts de cette BD est sa mise en scène au niveau du graphisme. Pour que le lecteur ne se perde pas, le choix a été fait de mettre les scènes du présent en noir et blanc et sépia et le passé en couleurs. Un choix judicieux pour illustrer le double récit qui est fait à travers ces pages. D’un côté, on suit Olivia Burton, de l’autre Richard Francis Burton. L’illustrateur prend même la peine de mêler l’histoire des personnages en les faisant parfois interagir. Ainsi, l’explorateur apparaît souvent dans les passages d’Olivia pour manifester ses sentiments quant à ses décisions. Cette immixtion répétée apporte une touche d’humour assez touchante à l’ensemble.

Extrait de la BD

Un personnage auquel on peut facilement s’identifier : Ce qui m’a aussi permis de bien accrocher à l’histoire, c’est le fait de se retrouver dans un récit autobiographique. J’ai eu beaucoup de faciliter à m’identifier à Olivia dès le début, peut-être parce qu’elle est enseignante elle aussi et qu’elle entretenait des relations assez complexes avec une partie de sa famille. La BD s’ouvre sur l’enterrement de son père qu’elle a peu connu et de cette famille presque étrangère qui lui parle de cet hypothétique ancêtre. C’est à partir de cet événement qu’elle commence à mener l’enquête. À mon sens, ce début parle à beaucoup de lecteurs. Qui n’a jamais vécu un enterrement où les souvenirs remontent à la surface par le biais de photos ou d’anecdotes, et où les langues se délient ? Personnellement, il a fallu le décès de mon arrière-grand-mère pour que mon grand-père me fasse découvrir deux albums remplis de vieilles photographies, dessins et cartes postales d’ancêtres de la famille.

Si on en revient à l’histoire, Olivia arrive à nous intéresser à ses propres recherches sur Richard Francis Burton. Cela devient peu à peu une obsession pour elle, et elle ne peut s’empêcher de se lancer sur ses traces, d’abord par des musées ou des institutions privées, puis par des voyages. De Londres à l’Afrique, elle nous fait voyager et marcher dans ses pas, comme nous le ferions nous-mêmes avec nos ancêtres. La volonté de connaître ses racines est profondément ancrée en soi. On a envie de savoir qui étaient nos ancêtres, ce qu’ils faisaient. Et rien n’est plus beau que de découvrir de petites ou de grandes anecdotes à leur sujet. Il y a une citation qui dit que l’« on descend tous d’un mendiant et d’un roi ». Peu importe finalement. Ce qui compte c’est le vertige de la découverte et la transmission de nos recherches. Et c’est en cela que le personnage est touchant de vérité et de sincérité.

La mise en lumière des recherches généalogiques : À travers cette BD, Olivia Burton met la lumière sur les difficultés et des risques de la généalogie. Je ne vous révèlerai rien pour ne pas vous gâcher la surprise, mais ce que je peux vous dire, c’est que l’autrice met bien en exergue les démarches à entreprendre pour ne pas aller droit dans le mur. Ainsi, la généalogie nécessite l’adoption d’une démarche presque scientifique, la nécessité de bien vérifier à chaque fois ses sources. Parfois, on peut trouver des informations sur place, par le biais d’internet et de tous les sites spécialisés sur le sujet (archives en ligne, sites dédiés à la généalogie qui mâchent le travail et recensent des arbres en ligne). À d’autres moments, il faut se déplacer parfois loin pour établir ces démarches, comme ici le fait le personnage d’Olivia. La BD a l’avantage de présenter la double émotion associée à la généalogie : le bonheur quand on découvre quelque chose, la frustration et la déception quand on n’arrive pas à trouver ce qu’on cherche ou qu’on s’est emballé trop vite. Ces recherches généalogiques ne nous appartiennent plus à la fin et il faut les partager comme un trésor qui mérite d’être transmis. C’est ce qu’Olivia Burton a fait en publiant ce livre. Cet aspect-là m’a également plu, surtout quand on connaît la fin de l’histoire pour l’autrice. Je me suis aussi retrouvée dans cette quête de transmission, puisque je suis moi-même en pleine confection d’un livret généalogique pour ma famille.

Bref, une belle mise en valeur de la généalogie qui donnera, je l’espère, envie aux lecteurs de se lancer dans cette grande aventure !

Photographie de Richard Francis Burton

La découverte de Richard Francis Burton : Enfin, ce roman graphique offre une véritable biographie de ce personnage historique anglais assez peu connu en France. Explorateur anglais du XIXe siècle, il a marqué son temps par ses expéditions en Afrique et par sa diffusion d’autres cultures. À travers ces pages, on découvre une personnalité forte, excentrique et ambitieuse au temps de la colonisation excessive. De ce point de vue-là, cet homme a manqué de chance, puisque c’est un de ses compagnons qui s’attribuera finalement la découverte des sources du Nil. D’ailleurs, j’ai eu un gros fou rire sur ces mystérieuses sources authentiques du Nil revendiquées par tant de pays. Cela m’a rappelé une autre source fluviale (la Loire pour ne pas la nommer ^^) où chacun revendiquait par des pancartes la paternité du soi-disant premier filet d’eau. Intéressant comme les humains ont toujours eu tendance à vouloir s’approprier la moindre parcelle de terre quand elle peut leur rapporter de l’argent par le biais du tourisme. Une aventure aux allures de BD de Tintin qui m’a fortement plu !

Les – :

Quelques longueurs : Parmi les défauts, il faut peut-être signaler quelques longueurs qui ont parfois un peu alourdi le récit. Cependant, je trouvais que cela montrait bien les moments où Olivia Burton s’embourbait un peu dans ses recherches et faisait du surplace.

Une quête personnelle qui ne plaira pas à tous : Pour moi, ce livre parlera surtout aux personnes qui aiment la généalogie, qui sont férus d’histoire et de personnages historiques. Pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec la généalogie, ce livre pourrait ne pas vous plaire, puisqu’il passe beaucoup de temps sur la recherche en elle-même. Et tout le monde n’est pas attiré par la généalogie. De ce point de vue-là, ce roman graphique pourrait ne pas emporter tout le monde.

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Bilan :

Une belle lecture dans laquelle je me suis reconnue. Les recherches généalogiques, le frisson qui vient avec quand on découvre quelque chose sur ses ancêtres, je connais bien ça. Un beau jeu de couleurs et de lumières sur les illustrations. Je ne connaissais pas du tout Richard Francis Burton comme explorateur. Une belle façon de le découvrir. J’ai adoré le voyage vers les sources du Nil… et les sources familiales.

5 commentaires

  1. C’est assez incroyable que tu sois tombée sur une BD si proche de ta propre volonté de retracer ton arbre généalogique ! 😀 ça doit être bien sympathique à lire, et inspirant 🙂
    Dans ma famille, c’est mon grand-père paternel qui s’est beaucoup intéressé à la généalogie, il est même remonté assez loin ! Moi j’avoue que ce n’est pas quelque chose qui me botte vraiment, même si je comprends que ça peut vite devenir un sacré passe-temps 🙂

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    • Oui, ce livre était vraiment chouette de ce côté-là 🙂 ça m’a pas mal reboostée pour m’y remettre.
      Ah oui bien sympa pour ton grand-père. Quand on tombe sur une branche noble, on peut vite remonter très loin. Mais c’est clair que la généalogie c’est particulier. Et ça ne plaît pas à tout le monde 😊 Merci pour ton message.

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